TROIS
LITANIES POUR LE CIEL
I
NÉBULEUSE
Nébuleuse à l’œil nu
Nébuleuse aux vertèbres
de métal, au ventre d'aspic
Aux cheveux de
palissandre à cinq branches
Nébuleuse lézard de la
nuit
Scaphandre des ténèbres
qui s'enfonce autour de la terre
Léopard de minuit
Nébuleuse en suspens,
crinière de filigrane
Aux griffes de neige et
de phosphore
Grise mine des clairs de
lune, incendie des étoiles
Graminée de la nuit,
pistil de la lumière
Nébuleuse aux feux de
paille, aux pailles de fer
Vitrage de pluie, de
glaives et de silex
Nébuleuse sur fond amer
Votre solitude
m'étreint.
II
L’ ÉTOILE MULTIPLE
L'Étoile à sept feux
verts
L'Étoile à feux
triangulaires
L'Étoile
du berger solitaire
L'Étoile solidaire de la
nuit
L'Étoile qui brille dans
le ciel vert
L'Étoile qui dérange le
circuit des bolides et météores
L'Étoile qui réveille les rois mages
Celle qui endort les
enfants
Celle qui dort dans le
fond de l'oeil
Celle qui bruine au
matin sur la Seine
et rumine son train d'images et d'enfer
Et celle qui constelle dans les cirques les selles
d'éléphant
L'Étoile du bon temps,
celle du bon accueil
L'Étoile
accroupie sur un parterre de fleurs
Celle qui se glisse dans
un coin de la Cène
Celle qu'il sied aux
mécènes
de
tendre aux pauvres artistes
Celle aussi que l'on
fixe chez le dentiste
Celle qui brille au bout
du téléphone
Celle qui passe à cheval
et pousse sa chanson réclame
Celle qui dégringole en
dansant dans le cercle des vivants
Pour turbiner aux
turbines dans les usines
Et profiter des heures
de lumière supplémentaire
Et rendre inoubliable le temps de la cantine
Pour avoir des vacances
payées
Pour aider la misère à
battre des ailes
et prévenir la mort
et suivre les enterrements
L'Étoile qui menace la géographie des
navigateurs imprudents
Et
délivre sans retard les prisonniers innocents
Celle qui
ramène les navires aux portes des villes
Qui aide
l'homme à descendre en scaphandre
à vingt mille lieues sous les mers
Cette étoile n'est pas encore celle
Qui
viendra un jour planter en terre
La première pierre du château, de la cité, de la
demeure
. que l'on offre aux
vainqueurs.
III
LA COURTE ETOILE
C'est la chasse à
courre, c'est la chasse à l'Etoile
une suite de courte étoile cette femme
qui suit ce pont de pierre
Comète de la ville elle
fait
le tour des quais
C'est elle qui fait les
quais de la ville
lumière qui file
sous les pieds de l'inconnu en chasse
C'est l'amour qui
s'avance en faisant la roue
la rencontre, le feu, le fer de lance
une Étoile qui sert aux lance-pierres, ces ponts de
pierre
qui vont où vont les ponts
ces jets de terre à d'autres terres
C'est l'amour de la
chasse qui pousse
entre les pavés fleuris de fleurs de serre
c'est le cor qui sonne un rassemblement d'Étoiles
D'inconnu à inconnu des
ponts de pierre
se lèvent, c'est l'amour et le ciel qui se
rejoignent
la tombée qui emporte
des cerfs morts
d'un signe à l'autre sur les carrières du zodiaque
C'est l'heure imprévue de la chasse à l'Étoile
l'heure de monter un cheval piaffant
l'heure des chasse à courre, l'heure des chiens de
race
C'est l'heure d'Ophélie
au fil de l'eau, l'heure des marins morts
l'heure des bateaux à voile comme des oiseaux
de mer sur l'immobilité de pierre
Sur toute la ville c'est
le silence
de la courte Étoile qui passe
d'oreille à oreille
et dépasse
les ponts qui s'espacent
de pont à pont
C'est l'ennui le vague
le temps
de la vague qui vogue
avec ses lames d'Étoiles et roule la barque
le
navire de Christophe Colomb
qui débarque et découvre des algues nouvelles
le naufrage qui vous pousse, l'abordage
d'une île très belle où poussent
des algues sauvages
La bouteille à la mer se
brise sur un rocher
et c'est une marée d'Étoiles
une nuit blanche, l'aventure qui s'avance
à pas de chasse à loup, l'inconnu traque de gauche
à droite
et pousse sur une île la courte Étoile
Un convoi de maisons
plonge lentement dans le fleuve
A droite à gauche l'île
se vide et désespère
Inerte, l'île n'est
qu'une île de pierre avec ses ponts
Sur un terrain vague, un
terrain de vague à l'âme
C'est la tombée de l'Étoile qui chemine
A raz de terre c'est un cimetière d'Étoiles
la tombée du ciel sur la terre
La tombée, c'est une
immense vallée qui se referme
Une Étoile de sang vert répandu
Un escalier géant, une cavalcade, une rivière
Une averse qui chasse d'un pont à l'autre
la
tombée de la nuit avec cette femme
qui passe.
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